Les critiques n’ont pas tardé, le gouvernement australien se disant « extrêmement déçu » et exhortant le Japon à revoir sa position. Le ministre des Affaires étrangères néo-zélandais Winston Peters a adressé à Tokyo un message similaire, fustigeant « une pratique dépassée et inutile ».
Le Japon s’abstiendra cependant d’aller chasser « dans les eaux de l’Antarctique ou dans l’hémisphère sud », a indiqué le porte-parole du gouvernement, Yoshihide Suga, lors d’un point presse. La pêche sera « limitée aux eaux territoriales et à la zone économique exclusive », « en accord avec les quotas de prises calculés selon la méthode de la CBI afin de ne pas épuiser les ressources », a-t-il assuré.
La Commission sera formellement notifiée « d’ici à la fin de l’année », ce qui permettra au retrait d’être effectif le 30 juin 2019. Yoshihide Suga a justifié ce retrait par « l’absence de concessions de la part des pays uniquement attachés à la protection des baleines », « bien que des éléments scientifiques confirment l’abondance de certaines espèces », selon lui.
« Le chemin à suivre »
La discorde est apparue « évidente » lors de la dernière réunion de la CBI en septembre, ce qui a conduit le Japon à prendre cette mesure, a-t-il expliqué. L’instance avait alors rejeté le texte phare porté par le Japon, baleine intitulé « le chemin à suivre ».
Il visait à mettre en place une double voie au sein de la CBI, instance de 89 pays membres, afin de faire co-exister la préservation et la chasse commerciale des baleines. Cette dernière aurait été gérée par un « comité de la chasse à la baleine durable ».
La proposition aurait aussi mis fin au moratoire de 1986, dont le Japon est signataire. Mais les pays défenseurs des baleines, conduits par l’Australie, l’Union européenne et les Etats-Unis, ont torpillé le texte nippon, par 41 voix contre 27.
Le vice-ministre japonais de la Pêche, Masaaki Taniai, avait vivement regretté le résultat du vote et brandi l’option ultime de quitter la CBI.
La « nation pirate des baleines »
Le gouvernement nippon ouvre un nouveau front entre les détracteurs et défenseurs de la pêche aux cétacés, que les Japonais, notamment la frange nationaliste, considèrent comme une importante tradition nippone multiséculaire.
De nombreux membres du Parti libéral-démocrate (PLD), formation conservatrice du Premier ministre Shinzo Abe, défendent « la richesse de cette culture », selon les termes de Yoshihide Suga.
Les organisations écologistes ont aussitôt réagi, condamnant avec force la nouvelle. « Il est clair que le gouvernement tente de faire passer cette annonce en douce à la fin de l’année, loin des projecteurs des médias internationaux, mais le monde n’est pas dupe », a commenté dans un communiqué Sam Annesley, responsable de la branche japonaise de Greenpeace. Et d’ajouter :
L’association américaine Humane Society International (HSI) a, de son côté, déploré que l’archipel « devienne une nation pirate des baleines ». Le Japon, a-t-elle noté, est le plus gros contributeur financier de la Commission baleinière, qui va donc devoir remplacer les fonds manquants. Malgré l’argument scientifique brandi depuis trois décennies par le Japon pour chasser les baleines, la chair de cet animal finit souvent sur les étals des poissonniers.